Page d’accueil | Billets | Nouvelles | Intronisés | Nominations | À propos | Contact
Par Martin Cleary
Imaginez que le président de la Fédération internationale de hockey sur glace vous demande spontanément d’encadrer l’équipe nationale masculine dans un pays étranger alors que vous n’êtes âgés que de 21 ans. Incroyable, mais vrai!
L’octogénaire d’Ottawa Derek Holmes n’a pas besoin d’imaginer à quoi ressemblait ce moment extraordinaire. C’est ce qu’il a réellement vécu en 1960. Alors que Derek Holmes avait tout juste terminé sa première et unique saison dans l’équipe des Lions de Wembley de la British National League, Bunny Ahearne a approché ce brillant marqueur avec une proposition qu’il n’avait pas le droit de refuser.
M. Ahearne a annoncé à Derek Holmes que la Finlande avait besoin d’un entraîneur en chef pour son équipe nationale masculine pour la saison 19601961, puisque l’entraîneur canadien en place, Joe Wirkkunen, était tombé malade. On envisageait Derek Holmes comme prochain entraîneur. Celui-ci était stupéfait.
Il a expliqué à M. Ahearne, un agent de voyages qui n’a jamais joué au hockey, qu’il avait signé un contrat avec une équipe d’Italie pour la saison 1960-1961. Néanmoins, Bunny Ahearne a dit à Derek Holmes de ne pas s’inquiéter et qu’il s’occuperait de ce contrat. Toujours désireux d’être un joueur, puisque ses habiletés au hockey convenaient parfaitement aux surfaces de glace européennes plus grandes, l’idée de pouvoir encadrer une équipe nationale était également fascinante et stimulante.
Finalement, il a accepté le poste d’entraîneur.
Jusqu’à ce jour, Derek Holmes se demande bien pourquoi M. Ahearne, né en Angleterre, l’a approché pour encadrer l’équipe nationale finlandaise. Sa seule explication est que Bunny Ahearne avait sûrement aimé la rapidité et la fluidité de son style de patinage et sa façon de compter des buts, en comparaison avec le caractère rude et agité qui s’affirmait alors dans le hockey nord-américain. Néanmoins, Derek Holmes faisait également preuve de maturité et d’une bonne connaissance du jeu.
La British National League était comme ça il y a environ soixante ans. Quand Derek Holmes jouait pour Wembley, il était normal d’y voir des salles combles de 10 000 spectateurs. C’était une soirée spéciale pour certains adeptes des Lions de Wembley, qui réservaient souvent pour dîner à l’intérieur du stade et qui voyaient leurs tables et chaises installées en plein milieu de la rangée de sièges générale.
« Il préférait un jeu plus discipliné », disait Derek Holmes lors d’une entrevue qu’il a accordée pour parler de sa longue carrière accomplie dans le hockey, laquelle franchira une nouvelle étape le 29 mars prochain lorsqu’il sera intronisé au Temple de la renommée du sport d’Ottawa, au cours d’une cérémonie virtuelle diffusée sur Rogers22 et YouTube.
Derek Holmes a été intronisé au Temple de la renommée de la Fédération internationale de hockey sur glace (IIHF) en 1999, et au Kemptville & District Sports Hall of Fame deux fois, la première fois en 2012 en tant que joueur individuel, puis en 2017 comme membre des Combines de Kemptville-Prescott de 1962 à 1963.
« Bien sûr, j’aimerais être entraîneur, mais ai-je le courage de le faire à 21 ans? », s’était-il demandé à l’époque. « Après avoir accepté le poste, j’ai appelé ma mère pour lui demander de m’envoyer le livre de Lloyd Percival, The Hockey Handbook. Quand nous avons joué contre les Soviétiques, j’ai remarqué qu’Anatoly Tarasov (l’entraîneur en chef de l’Union soviétique) avait le même livre. »
Anatoly Tarasov était considéré comme la force motrice de la puissante machine de hockey soviétique, qui a remporté neuf championnats du monde et trois médailles d’or aux Olympiques d’hiver pendant son règne. Le livre de Lloyd Percival, qui a été publié pour la première fois en 1951, était l’une de ses bibles du hockey. On dit qu’Anatoly Tarasov a affirmé : « Votre fabuleux livre qui nous initie aux mystères du hockey canadien, je l’ai lu comme un bon élève. ».
Derek Holmes n’a pas perdu de temps, d’ailleurs il voyageait dans toute la Finlande pour recruter des joueurs pour l’équipe nationale naissante, et il assistait à des séances de formation à l’intention des entraîneurs et des gardiens de but.
« J’apprenais sur le tas. J’étais le premier entraîneur étranger de Finlande. J’étais Canadien et je jouais au hockey. C’était le respect (qu’il avait) », a dit Derek Holmes.
Lorsque Derek Holmes a assemblé son équipe, celle-ci comptait 17 joueurs (2 gardiens, 4 défenseurs et 11 attaquants), une liste plutôt courte par rapport aux formations de 20 joueurs d’aujourd’hui. Du fait que l’âge moyen des joueurs était d’un peu moins de 23 ans, l’équipe était la deuxième plus jeune aux championnats du monde de 1961.
La Finlande s’est classée septième aux championnats du monde avec une seule victoire, contre l’Allemagne de l’Ouest, une égalité avec l’Allemagne de l’Est et cinq défaites. Aux championnats d’Europe, la Finlande s’était classée cinquième.
« Les joueurs étaient bien avec moi (comme entraîneur). Deux d’entre eux parlaient anglais et mon interprète était un gars de Thunder Bay, qui passait mon message avec tellement d’enthousiasme », raconte Derek Holmes. « La Finlande commençait tout juste à progresser et elle entretenait une rivalité intense avec la Suède. La Finlande était toujours un cran derrière les Soviétiques et les Tchèques, dont les joueurs étaient meilleurs et plus nombreux. »
Même s’il a adoré son expérience d’entraîneur avec les Finlandais, une année lui a suffi. Il voulait renouer avec le jeu en tant que joueur, raison pour laquelle il avait quitté Toronto à 19 ans en premier lieu.
À 15 ans, Derek Holmes s’est fait une place au sein des Royals, l’équipe masculine intermédiaire de Kemptville, sa ville natale. Il a remporté avec son équipe, alors encadrée par l’entraîneur Lloyd Laporte, le titre de la St. Lawrence Hockey League. L’année suivante, en 1956, il est recruté par Bob Davidson, dépisteur en chef des Maple Leafs de Toronto, pour poursuivre ses études à l’Université de St. Michael’s College de Toronto et y jouer dans l’équipe junior « B » des Buzzers.
Parmi les Buzzers patinent de futurs joueurs de la LNH : Dave Keon, Gerry Cheevers et Terry O’Malley. Malgré une saison régulière médiocre (10-12-2), les Buzzers ont remporté le championnat de la ligue municipale de 1957. Ils ont malheureusement dû renoncer au championnat All-Ontario, puisqu’il y avait un confit d’horaire avec les examens scolaires.
De retour à Ottawa, il a joué une saison et a été capitaine des Shamrocks d’Ottawa dans la ligue de hockey junior interprovinciale avec l’entraîneur Brian Lynch, membre du Temple de la renommée du sport d’Ottawa.
Derek Holmes s’est joint aux Montagnards pour la saison junior 1958-1959 et ce fut pour lui une année exceptionnelle. Il a été joueur étoile ainsi que le joueur le plus utile de la ligue, terminant troisième au pointage dans la ligue de saison régulière. Lorsque les Montagnards ont été éliminés des séries éliminatoires interprovinciales, Derek Holmes a ensuite été repêché par l’équipe Little Lumber Kings de Pembroke, qui a ensuite remporté le championnat de la ligue. Il a terminé sa saison en jouant pour la Canadian Tire Corporation d’Ottawa de la ligue interprovinciale de hockey senior, cédant la victoire à la Hull Legion dans la finale de la division Est.
En quête d’aventure, Dereck Holmes et ses amis Nick Foster et Viger Gendron signent avec les Lions de Wembley pour la saison 1959-1960 de la British National League. C’était le début d’une période de 15 ans durant laquelle Derek Holmes a connu de nombreux niveaux de jeu partout dans le monde.
Durant la première moitié des années 1960, il a remporté quatre titres seniors de la St. Lawrence Hockey League avec les Combines de Prescott-Kemptville, les Royals de Prescott-Kemptville et les Combines de Morrisburg. Entre les titres gagnants rapportés par les équipes de Prescott-Kemptville et de Morrisburg, il s’est fait un nom en Europe.
Après avoir été entraîneur-joueur pour le HC Viège en Suisse en 1963-1964 et remporté la Coupe de Suisse, il s’est joint au club EC Kitzbühel d’Autriche pour sa prochaine saison, remportant le prix du joueur le plus utile lors de la Coupe Spengler en 1965.
À la fin des années 1960, il a joué pour l’équipe nationale de hockey de l’Est du Canada dans la Ligue de hockey senior du Québec de 1967-1968. L’équipe était aussi appelée les Nationals de Hull et n’a joué que des matchs hors-concours, avec un record de 19193. Sur le plan international, les Nationals ont obtenu 572 en préparation des Jeux olympiques de 1968.
Le Canada a remporté la médaille de bronze aux Jeux olympiques d’hiver de 1968, qui faisait également office de championnat du monde, mais Derek Holmes n’a pas pu participer à cette victoire en raison d’une blessure à la hanche. Il a mis fin à sa carrière dans l’équipe nationale en 1968-1969, en tant que capitaine de l’équipe, laquelle s’est classée quatrième aux championnats du monde à Stockholm.
À l’âge de 30 ans, Derek Holmes a diminué son horaire de hockey et s’est inscrit à l’Université Carleton, où il a obtenu un baccalauréat en histoire tout en jouant pour les Ravens. Au cours de sa deuxième année universitaire (1970-1971), il a été capitaine de l’équipe championne de la division Est de la QuebecOntario Athletic Association, et il s’est classé deuxième au pointage derrière l’ancien joueur de l’équipe nationale Morris Mott de l’Université Queen’s et il a été nommé joueur étoile de la ligue.
Après avoir obtenu son diplôme, Derek Holmes s’est rendu en Suisse à titre d’entraîneur-joueur dans la Ligue nationale suisse lors des saisons 19711972 et 19731974. Il a également été l’entraîneur en chef de la Suisse aux Jeux olympiques d’hiver de 1972, année où le Canada n’a pas envoyé d’équipe en raison d’un désaccord avec la Fédération internationale de hockey sur glace. La Suisse s’est classée 10e avec un record de 032. Au Championnat du monde de 1972, la Suisse a atteint la sixième place avec un pointage de 19.
En 1974, Derek Holmes a été recruté pour se joindre à Hockey Canada, l’organisme national de gouvernance du hockey amateur, en raison de ses multiples expériences européennes et de sa compréhension du jeu outre-mer.
Au cours des sept années suivantes, il a occupé divers postes de haut niveau et a été un membre important du groupe chargé de trouver un moyen pour « battre les Russes » et ramener le Canada aux Jeux olympiques d’hiver, après avoir manqué les Jeux de 1972 et de 1976. Derek Holmes a été responsable de la sélection des joueurs pour les équipes des championnats du monde de 1977 et de 1978, et il a servi comme entraîneur adjoint lorsque le Canada s’est classé quatrième ainsi que l’année où l’équipe a remporté une médaille de bronze.
Soixante-cinq joueurs juniors, seniors, universitaires et européens ont été repérés pour l’équipe olympique, et le projet de deux ans a mené l’équipe au sixième rang aux Jeux olympiques de Lake Placid en 1980.
Lorsque Derek Holmes a quitté Hockey Canada en 1980, il a mis le hockey de côté pendant six ans pour travailler dans le secteur privé. Pendant ce temps, il recevait occasionnellement des demandes de joueurs qui ne pouvaient pas entrer dans la LNH et qui désiraient aller en Europe.
Au milieu des années 1980, Derek Holmes a joué son dernier rôle dans le monde du hockey, celui d’agent de joueurs. Il a occupé cette fonction jusqu’en 2018, à l’âge de 78 ans.
Grâce à ses contacts européens, il envoyait des joueurs canadiens talentueux à l’étranger. Par ailleurs, ses liens avec l’ancien joueur de l’équipe nationale de la Tchécoslovaquie Jaro Tuma lui ont permis de faire venir des joueurs européens au Canada.
« Pendant tout ce temps, j’ai reçu des appels. Il n’y avait personne dans l’industrie. Je suis devenu la référence », expliquait Derek Holmes. « Ça m’est venu naturellement. Je connaissais les affaires des deux côtés de l’océan. »
Holmes a prolongé les carrières de hockey de dizaines de joueurs canadiens, dont Bruce Cassidy, ancien joueur des 67 d’Ottawa et actuel entraîneur en chef des Bruins de Boston, Dale McCourt, Rick Middleton et l’ancien joueur de l’équipe nationale Fran Huck.
Bruce Cassidy a désigné Derek Holmes comme « le meilleur dans l’industrie », le qualifiant d’ami incroyable, un modèle de loyauté, de professionnalisme, de gentillesse et de compassion.
« Il est devenu pour moi un père adoptif, il me donnait beaucoup plus que de simples conseils sur le hockey », écrivait Bruce Cassidy dans sa lettre de mise en candidature pour que Derek Holmes soit intronisé au Temple de la renommée du sport d’Ottawa. « Mon père est décédé il y a quelques années, et Derek a toujours été disponible pour me soutenir à ce moment-là. »
« Je lui serai toujours reconnaissant d’avoir été présent, autant dans les bons moments que dans les moments plus difficiles. »
« C’est spécial d’être intronisé au temple de la renommée de sa ville natale. L’IIHF était un tout autre groupe de gens qui m’a reconnu. Quand on joue au hockey, on ne pense pas que quelque chose du genre peut se réaliser. »
Derek Holmes sera intronisé au Temple de la renommée du sport d’Ottawa le lundi 29 mars à 20 h. La cérémonie sera diffusée sur Rogers22 et sur YouTube.


Leave a comment